Nutrition végétale:
évolution du modèle, d'Aristote à Knop, et après...
Biologie 3e - Cliquez pour tout renseignement

d'après Daniel Rousselet et Michel Alberty - © De Boeck-Wesmael, s.a., Bruxelles 1990
pages 9 à 13 du manuel "Eléments de Biologie 3e" (option complémentaire) version 1990
Ce manuel, complet et concis, est disponible dans sa version de 1993, édition 2000, à 5,70 EUR.
J'utilise ce livre avec mes élèves de 14-15 ans et des documents disponibles à
Inforef, dont la formidable cassette vidéo sur la photosynthèse et la respiration de mon ancienne collègue Simone Goffinet.

QUESTION | PREMIER MODELE | DEUXIEME MODELE | TROISIEME MODELE | FECONDITE DU TROISIEME MODELE | CONCLUSION


Info Question: comment expliquer la croissance des plantes ?

Il est relativement simple de connaître le régime alimentaire d'un animal par l'observation directe, par contre l'étude de la nutrition des plantes se révèle quasi impossible par la même méthode: aucun mouvement de prise de nourriture n'est perceptible, la croissance est lente et discrète, les plantes semblent immobiles. Elles paraissent produire elles-mêmes leur nourriture...

Pour répondre à la question: "de quoi les plantes se nourrissent-elles?" , les hommes imaginent une réponse possible, la plus logique possible, formulée sous forme d'un modèle explicatif:

Un modèle est la représentation que les scientifiques se font d'un phénomène qu'ils ne peuvent pas observer directement et qu'ils élaborent à partir d'observations indirectes et d'hypothèses vérifiées; un modèle évolue avec le temps.
La plupart des explications scientifiques, les "théories scientifiques" sont des modèles.

Exemples de modèles explicatifs: le portrait-robot, le géocentrisme, le virus du SIDA, l'atome.

Le but de la démarche scientifique est donc de se mettre d'accord, progressivement, sur un modèle que les scientifiques jugent ensemble comme le plus plausible, en se basant sur des observations et des expériences.

QUESTION | PREMIER MODELE | DEUXIEME MODELE | TROISIEME MODELE | FECONDITE DU TROISIEME MODELE | CONCLUSION


Info Evolution du modèle de nutrition végétale

1) Un premier modèle, celui d'Aristote

Aristote
Aristote (384-322 av. J.-C.)
Pour ce philosophe grec, les plantes se nourrissent seulement d'humus, donc de matières organiques qu'elles puisent dans le sol.

L'amélioration des rendements agricoles par épandage de déchets organiques comme le fumier semblerait confirmer cette explication.

Le simple bon sens confirme intuitivement cette manière d'expliquer ce phénomène...

"Le bon sens n'est pas un guide infaillible"
(Jean Rostand)

Modèle d'Aristote
NUTRITION VEGETALE
=
une prise d'humus

2) Vers un deuxième modèle explicatif avec Van Helmont

Van Helmont
Van Helmont (1577-1644)
Van Helmont était un alchimiste, médecin et philosophe belge, plutôt adversaire des idées d'Aristote. Il accordait à l'eau (et à l'air) une place primordiale dans la composition de la matière.

Frappé par le fait que les plantes ne se développent bien que si l'eau leur est distribuée régulièrement, il pense que les plantes se nourrissent exclusivement d'eau.

Savant méthodique et d'une rare précision pour son époque, Van Helmont réalisa l'expérience suivante.

Un jeune pied de saule de 2,3 kg (=5 livres de l'époque) est placé en culture dans un pot en terre cuite contenant 90,720 kg (200 livres) de terre sèche.

Toute nourriture organique (feuilles mortes, déchets animaux,...) est soustraite à cet arbre cultivé à l'extérieur. seule la pluie alimente la plante.

Après 5 ans, le saule est déraciné et sa masse mesurée: de 5 livres, il est passé à 169 livres et 3 onces (soit 76,731 kg). Quant à la terre du pot, après avoir été séchée, Van helmont constate que la masse est restée quasi identique (quelques grammes en moins qu'au départ).

Expérience de Van Helmont
Sa conclusion:

L'eau à elle-seule suffit pour produire 74,431 kg de bois, d'écorce et de racines. Pour lui, la seule nourriture des plantes, c'est l'eau. Ce n'est pas le terreau ou l'humus qui sert de nourriture pour la croissance des plantes: c'est seulement un support.

A partir des explications magistrales de Van Helmont, les scientifiques optèrent pour un nouveau modèle explicatif.

Avez-vous déjà fait pousser des haricots sur du coton humide ?

Que signifie les termes hydroponique et aquaculture ?

Essayez donc de réfuter (avec arguments) la théorie de Van Helmont avant de lire la suite.

Modèle de Van Helmont
NUTRITION VEGETALE
=
une prise d'eau

3) Evolution vers un troisième modèle explicatif (Knop, Von Sachs,...)

Julius Von Sachs
Julius Von Sachs (1832-1897)
Au dix-neuvième siècle, les scientifiques savent que l'eau naturelle n'est pas un corps chimique simple. Dans la nature, l'eau est en fait une solution de divers sels minéraux. Seule l'eau distillée a le droit à l'appellation "substance pure".

Qu'en devenait-il de l'explication de Van Helmont ?

Les sels minéraux présents dans l'eau naturelle sont-ils nécessaires ou pas à la croissance des végétaux ?
Lesquels sont indispensables ?

Quelques savants dont J. Knop, J. Von Sachs, G. Ville... ont étudié le problème et démontré l'importance des sels minéraux par des expériences.

Voici les résultats d'une expérience de ce type ( culture de plants de soucis ):
© De Boeck-Wesmael, s.a., Bruxelles 1990
Une même plante est placée dans des solutions nutritives de composition chimique différente.
La solution nutritive complète (dite de Knop) et la solution nutritive minimale (l'eau distillée) servent de
témoins pour comparer la croissance des différentes plantules.
© De Boeck-Wesmael - Daniel Rousselet

 

L'usage de témoins est fréquent en sciences. Expérimentalement, il faut veiller à placer le(s) témoin(s) dans des conditions identiques (à l'exception du facteur dont on cherche l'influence) à celle des autres montages (même espèce de plante, même taille de départ, même environnement, même volume de liquide utilisé,...)

 

Cette façon de procéder permet de comparer la croissance de plantes semblables placées dans des milieux dépourvus ou enrichis de sels minéraux.

Dans l'eau pure, la croissance est très faible. Elle est optimale dans la solution de Knop où les différents éléments chimiques sont présents.

Si certains éléments manquent, il y a une maladie de carence.

L'explication de Van Helmont devient caduque une modification de son modèle de nutrition végétale devient indispensable.

Les plantes ont bien besoin d'eau pour croître, mais elles ont aussi besoin de sels minéraux dissous dans celle-ci.

Modèle après Knop, Von Sachs,...
NUTRITION VEGETALE
=
une prise d'eau chargée d'un minimum de sels contenant les éléments chimiques Ca, N, K, Mg, P, S, Fe, Cl, Na

4) Vérification de la validité de ce modèle

Pourquoi un modèle est-il plus valide qu'un autre ?

Plus un grand nombre d'observations est explicable par un modèle, plus le modèle est fécond.

Le dernier modèle présenté au
paragraphe 3 permet d'expliquer des maladies de plantes rencontrées dans certaines terres. Si on ajoute l'un ou l'autre sel minéral, la maladie disparaît: il s'agissait d'une maladie de carence (carence = manque).

La fertilisation chimique des terres par les
engrais est une pratique devenue courante. En enrichissant (modérément) les sols en sels minéraux, les agriculteurs peuvent obtenir des rendements nettement supérieurs à ceux obtenus précédemment, pour une même superficie et pour les mêmes plantes cultivées

Il est même possible de réaliser des cultures sur de simples solutions aqueuses: on parle d'aquaculture.

On peut comprendre le comportement des plantes carnivores!

Ces plantes croissent systématiquement dans des zones marécageuses où l'eau est très pauvre en sels minéraux. Ces plantes puisent les sels minéraux dont elles ont besoin chez les insectes qu'elles capturent et qu'elles digèrent.

Drosera
Un exemple de plante carnivore,
la drosera

Pour savoir si les plantes absorbent et utilisent effectivement les sels minéraux en solution, on peut réaliser une analyse chimique des éléments qui s'y trouvent, comme le firent Lats-Chaw et Rilier en 1924:

Voici la composition chimique, élément par élément, d'un plant de blé: Voici les éléments présents dans la solution de Knop:
oxygène O 44,5 %
carbone C 43,5 %
hydrogène H 6,2 %
azote N 1,4 %
phosphore,
potassium,
calcium,
soufre,
magnésium
P
K
Ca
S
Mg
3,8 %
autres - 0,6 %
O
H
Ca
N
K
Mg
P
S
Fe
Cl
Na

5) Conclusion

Le dernier modèle de la nutrition végétale présenté au paragraphe 3 n'est donc plus assez fécond !

Voyez-vous pourquoi?

Le modèle de la photosynthèse chlorophyllienne est le modèle actuel de la nutrition végétale (mais je n'ai pas publié de cours à ce sujet: on ne peux pas tout faire... d'ailleurs les manuels de Daniel Rousselet parus depuis sont disponibles et vous informent à ce sujet)

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